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recherche bactériologique
28/06/2017 à 11h43
Bonjour
Un patient présentant une polyarthrite m'a été adressé par une rhumatologue pour vérifier si problème dentaire ou parodontal, en me précisant " si abcès ou moindre doute, faire une recherche bactériologique".
Il présente des poches paro avec dents mobiles, dont une poche qui suppure à la palpation (46 vestibulaire).
Au niveau de son bilan sanguin, la proteine c réactive est à 7,4 mg/let la VS à 27mm, le reste est normal.
Qu'est ce que vous me conseillez?
Merci d'avance pour vos avis.
28/06/2017 à 11h57
Tu es manifestement devant une parodontite active : Des poches profondes, effacement de la lamina dura généralisée, et les autres signes cliniques .....
Tu informes le patient, tu rends compte au rhumato en lui précisant les microbes habituels de ce genre de pathologie, si il veut des précisions , il y a des tests chez Pierre Fabre, mais c' est plutôt à utiliser en seconde intention après premiere phase du TT Paro
28/06/2017 à 12h39
Il faut surtout TRAITER la parodontite, avec ou sans analyse bactériologique préalable (ça dépend des écoles - moi, je préfère avec) pour résoudre l'infection et diminuer l'inflammation locale et générale qui en decoule.
28/06/2017 à 13h07
Merci pour vos réponses.
@ BA :
- les autres signes de la phase active auxquels tu penses sont augmentation ou apparition de la mobilité, saignements, suppuration ...
- les bactéries habituelles Aa, P gingivalis. Il y en a d'autres?
@ murielle : tu ferais l'analyse, commencerais des curetages, extractions 18.48 avec pertes +++ et prescrirais éventuellement des ab en fonction des résultats de l'analyse bactériologique? tu aurais un autre plan d'action?
28/06/2017 à 15h57
Un microscope est bien utile dans un cas comme celui là pour confirmer la présence de toute la flore bactérienne classique dans ce genre de pathologie et peut être aussi ( surement ...) une amibiase que tu traiteras selon ton école de pensée. Le Flagyl va surement être une aide précieuse en complément de ton action in situ.
Enfin il y a peut être bien quelques traitements endo à refaire...
Un bien beau cas en tout cas !
28/06/2017 à 17h03
0/ Extraction de 18 et 48, ... ... ou pas ...
1/ Apprentissage des soins locaux au patient et motivation +++++,
... et laisser le patient bosser pendant un mois minimum avant de passer à la phase 3/.
2/ Contention des dents hyper mobiles si besoin.
3/ Analyse bactériologique.
4/ Séances d'assainissement (bouche entière à chaque fois !!!) espacées de 3-4 semaines à chaque fois et en allant à chaque fois un peu plus profondément.
3-4 séances au total et atb à cheval sur la dernière.
5/ Ajustement occlusal si besoin (assez fréquent dans les parodontites sévères)
6/ Si nécessaire, chirurgies d'assainissement (a minima) dans les zones les plus profondes ou dans les furcations qui n'auraient pas pu être instrumentées en non chirurgical.
7/ Suivi au fil du temps. (On appelait ça "maintenance", mais je n'aime pas ce terme qui pourrait laisser pense que c'est nous qui maintenons le résultat, alors que c'est le patient. Nous, on l'accompagne, on le suit...)
Au total, la phase la plus importante, c'est la phase 1 !!!!!
Tout ce qu'on va faire après, c'est utile, mais ne sera efficace que si le patient fait sa part du boulot (et ça, c'est 80% du résultat !)
Encore faut-il qu'on lui apprenne bien comment faire ce boulot !!! Et qu'on le motive !!!
C'est à mon avis ce qui est le plus souvent zappé en paro et qui fait que les résultats ne sont pas au rendez-vous...
28/06/2017 à 17h07
Vous utilisez quel labo pour les tests bactériens ?
Il y avait un labo du côté de Marseille (me rappelle plus le nom) mais ça leur est monté à la tête et du jour au lendemain les tarifs sont devenus délirants...
28/06/2017 à 22h10
Comme cela a été dit, la préparation initiale est essentielle et le suivi aussi. Des études de cohortes au long cours ont montré qu'à 10 ans le nombre de dents fonctionnelles en arcade dépendait plus du suivi trimestriel ( indice de plaque, indice de saignement au sondage, remotivation, réinterventions à minima sur les sites en cours de réactivation ) que de la nature de l'acte chirurgical.
ca c'est pour la clinique.
Pour ce qui est de l'immunité et des éventuelles corrélations entre les réactions immunitaires intervenant dans une parodontite et celles qui sont impliquées dans une PR, effectivement il peut sembler judicieux, sur le plan, scientifique d'identifier les souches.
Or, les différents potentiels redox, taux de perfusion en oxygene en fonction de la profondeur de poche, technique de prélèvement ( normalement sous flux d'azote et à un taux d'hygrométrie constant ) sans même évoquer le milieu de transport puis de culture, font que ton prélèvement réalisé en cabinet ne permettra pas d'identifier tous les sérotypes. je doute de son utilité clinique dans le cas présent, à moins qu'il n'existe une technique spécifique pour une souche donnée. ( sonde ADN pour PG , PI, Aa )
Le microscope est un bon outil de motivation du patient...
OK pour les amibes et certaines levures qui présentent des corrélations avec des parodontite dites "réfractaires" .
Il faudrait revoir la littérature spécifique sur ce sujet pour savoir s'il y a des corrélations entre des activations monoclonales ou polyclonales du système immunitaire, chercher la ou les souches etc etc ... ça me semble être un travail universitaire.
Dans une parodontite complexe évolutive, d'un point de vue probabiliste, PG PI et généralement Aa sont toujours présents.
28/06/2017 à 22h39
Je travaille avec Biocentric qui identifie 11 souches par une technique de sondes ADN.
Les complexes rouge (PG, TF, TD) et orange (PI, PM, FN) sont présents pour une ou plusieurs de leurs bactéries quasi systématiquement effectivement.
En revanche, sur un grand nombre d'analyses que j'ai réalisées à ce jour, AA est très rare, contrairement à ce qu'on pourrait supposer. (Par contre, quand il est présent, il vaut mieux ne pas le louper...)
29/06/2017 à 12h44
Un grand merci pour toutes vos réponses si détaillées. Je me rends compte que j'ai certaines lacunes, mais je suis désireuse d'apprendre et de me perfectionner
Les amibes, quelle différence avec les parasites?
@ Murielle :
- tu te procures où les tests pour tes analyses avec Biocentric?
- tu attends les résultats de l'analyse bactériologique pour commencer les séances d'assainissement?
- ta prescription d'atb à cheval sur la dernière séance d'assainissement est systématique ou fonction de l'analyse bactériologique?
- tu as entièrement raison sur l'importance de la phase 1. Souvent j'ai l'impression d'avoir été convaincante mais les résultats ne sont souvent pas à la hauteur. Tu as des trucs pour expliquer aux patients?
Merci d'avance
29/06/2017 à 17h05
> - tu te procures où les tests pour tes analyses avec Biocentric?
Tu les appelles
> - tu attends les résultats de l'analyse bactériologique pour commencer les
> séances d'assainissement?
Non
> - ta prescription d'atb à cheval sur la dernière séance d'assainissement est
> systématique ou fonction de l'analyse bactériologique?
Systématique en fonction des résultats de l'AB ;-)
> - tu as entièrement raison sur l'importance de la phase 1. Souvent j'ai
> l'impression d'avoir été convaincante mais les résultats ne sont souvent pas à
> la hauteur. Tu as des trucs pour expliquer aux patients?
De la bienveillance, du temps, de la salive, et de la persévérance car il faut souvent répéter les mêmes choses...
29/06/2017 à 22h37
Comme cela te l'a été dit, le contrôle de la flore bactérienne pathogène sera l'élément déterminant dans la prise en charge globale de ton patient. Il existe effectivement des corrélations entre les infections, dont les parodontites, et les PR. Quant à rechercher un serotype déterminé pour savoir s'il est en cause dans l'activation des phénomènes de destructions tissulaires auto-immuns en cause dans les PR... pourquoi pas ? c'est très intéressant. Mais sur le plan clinique ? Nous voulons remplacer la flore pathogène par une flore commensale qui va occuper le terrain... avons nous réellement besoin de savoir quelle est la souche qui présente des analogies antigéniques intervenant dans une activation monoclonale B qui sera responsable des auto anticorps anti collagène etc etc ...
Quand on soigne un patient RAA, on ne cherche pas à chaque séance s'il est porteur en bouche d'un strepto hémolytique A.
mais dans ton cas, de mémoire, sur le plan clinique, il ne faut pas oublier que ton patient sera sans doute, soit sous métothrexate ou salazopyrine avec ou sans corticoïde... pas cool pour une parodontite active.
30/06/2017 à 07h47
Guillaume T écrivait:
---------------------
> Comme cela te l'a été dit, le contrôle de la flore bactérienne pathogène sera
> l'élément déterminant dans la prise en charge globale de ton patient. Il existe
> effectivement des corrélations entre les infections, dont les parodontites, et
> les PR. Quant à rechercher un serotype déterminé pour savoir s'il est en cause
> dans l'activation des phénomènes de destructions tissulaires auto-immuns en
> cause dans les PR... pourquoi pas ? c'est très intéressant. Mais sur le plan
> clinique ? Nous voulons remplacer la flore pathogène par une flore commensale
> qui va occuper le terrain... avons nous réellement besoin de savoir quelle est
En assainissant, la flore sympa va prendre le dessus sur la flore pathogène, c'est bien ça?
> la souche qui présente des analogies antigéniques intervenant dans une
> activation monoclonale B qui sera responsable des auto anticorps anti collagène
> etc etc ...
Excuse moi, mais je ne comprends pas ces mécanismes, tu pourrais m'expliquer stp?
> Quand on soigne un patient RAA, on ne cherche pas à chaque séance s'il est
> porteur en bouche d'un strepto hémolytique A.
> mais dans ton cas, de mémoire, sur le plan clinique, il ne faut pas oublier que
> ton patient sera sans doute, soit sous métothrexate ou salazopyrine avec ou sans
> corticoïde... pas cool pour une parodontite active.
Le traitement médical va favoriser le développement de la parodontite active? être un facteur défavorable pour passer de la phase active à une phase de repos?
Merci d'avance pour ta/vos réponse (s)
01/07/2017 à 10h03
Le traitement médical favorise la diminution de la réponse immunitaire du patient. C'est ce qu'on veut pour traiter le RAA, et globalement les pathologies à composante auto-immune.
En parallèle cela augmente donc le risque infectieux.
Evidemment, cela complique la parodontite, et freine la réponse au traitement que nous mettons en place, puisque la patient se défend moins bien.
01/07/2017 à 10h16
Vu hier un patient de 31 ans, en pleine forme jusqu'à découverte d'une maladie de Crohn.
Traitement depuis 6 mois par un "______umab" : immunosuppresseur.
Conséquence: la gingivite qu'il avait apparemment précédemment s'est aggravée de manière fulgurante, et je trouve hier les signes radios d'une paro débutante mais agressive bien présente.
Parallèlement, présence d'aphtes géants (diamètre 1,5cm pour le plus grand observé hier) dès qu'il a un coup de stress ou de fatigue (stress et/ou fatigue abaissent aussi l'immunité)
On va traiter bien sûr, mais ce ne sera pas aussi simple que chez le patient indemne de problème médical...
02/07/2017 à 07h26
Tu trouveras beaucoup de littérature, de plus en plus complexe sur ces sujets. Bien sur, nous aimerions tout comprendre...ce n'est pas possible, le volume des connaissances scientifiques double tous les ans, ce qui n'est pas le cas de ce qui me reste de cervelle disponible.
Sur le plan clinique: une profondeur moyenne de poche de 5 mm constitue une porte d'entrée infectieuse majeure ( la surface de la paume de la main ) qui va activer un processus inflammatoire extrêmement complexe.
Est-il besoin de connaître tous les médiateurs et les souches bactériennes pour concevoir une clinique raisonnée? Pour ma part, je me contente d'appréhender les phénomènes globaux.
Le traitement des pathologies auto-immunes a énormément évolué en très peu de temps.
Encore récemment les médecins utilisaient des rouleaux compresseurs non spécifiques ( corticoïdes, métothrexate, salazopyrine... ) qui, sauf erreur de ma part, sont peu a peu abandonnés au profit de molécules extrêmement pointues (et chères).
Méfie toi des parodontites évolutives dans ce contexte, ça peut très mal tourner, comme cela te l'a été signalé plus haut. En revanche je ne suis pas certain qu'il soit absolument nécessaire d'identifier les souches pour agir "globalement" et efficacement, même si ça reste intellectuellement très intéressant.
Il faudrait que je revois la littérature, mais je crois savoir que dans la PR des anticorps monoclonaux anti RANKL peuvent être utilisés. Méfiance ! Ils ont une action spécifique sur les ostéoclastes et c'est par conséquent tout le remodelage osseux qui est affecté... en gros tu as un risque d'ONM comparable a celui induit par les BPS sauf que la rémanence est de trois mois au lieu de dix ans...
L'absence de suivi paro se paie très cher. C'est forcément trimestriel avec des indicateurs quantifiables et de la remotivation.
Moralité : intervenir en amont de la pathologie ! si tu as des poches profondes et que ton patient va "bénéficier" d'injections de Denosumab , il faut envisager quelques extractions, c'est beaucoup plus raisonnable.
02/07/2017 à 12h16
GuillaumeT, murielle un grand merci pour vos réponses très intéressantes et constructives
ma toute petite cervelle grandit un peu!
@ Murielle
- quand tu fais ton analyse bactériologique biometric, c'est le même principe que celle de gXm (je ne sais pas si je peux citer le nom sur le site) sunstar il me semble? pour celui ci je crois que c'est une mèche de papier que tu insères dans les poches paro.
- tu réalises un "sondage "avec ces mèches dans toutes les poches ou sinon comment tu orientes ton choix de poches à tester?
- par ailleurs, si tu réalises l'analyse bactério, que tu commences l'assainissement, lorsque tu reçois les résultats de l'analyse est ce qu'on peut se dire que ce résultat est encore fiable puisqu'en commençant l'assainissement la flore a sûrement commencé à se modifier?
Merci d'avance
02/07/2017 à 14h26
Je réalise le prélèvement après que le patient a commencé à prendre des nouvelles habitudes, mais avant de démarrer l'assainissement à proprement parler.
Effectivement, au moment où les antibiotiques seront donnés, la fore se sera certainement un peu modifiée, mais je ne trouverais pas logique qu'elle ait changé du tout au tout en remplaçant certaines familles de bactéries par d'autres non présentes au début. Je suppose donc que l'antibiotique choisi sera donc bien actif sur les espèces en présence dans les tissus.
Je prélève (pointes de papier stériles effectivement) dans les poches les plus profondes, après sondage de l'ensemble de la bouche pour identifier ces zones à prélever.